Léonor de Recondo
«... je croyais pouvoir tout supporter puisque j'avais survécu à ton départ... »
Une parenthèse poétique, chargée de souffrance et d'amour filial, de lien mère-fille, ce lien que rien ne peut altérer, quoi qu'il se passe, quelle que soit la séparation, voulue ou subie. Une parenthèse qui me permet de savourer ma situation privilégiée.
Magdalena a 44 ans. Comédienne, actrice, elle est connue et reconnue à la scène comme au cinéma. Un jour, elle reçoit un appel de son agent : on a retrouvé sa mère. Cette maman, perdue de vue du jour au lendemain depuis 30 ans. Cette maman dépressive, qui s'était enfoncée dans son chagrin avant de disparaître totalement.
Magda ne réfléchit pas, elle se rend à l'adresse indiquée pour retrouver celle qu'elle a tenté d'oublier, de faire disparaître à chaque rôle endossé, celle dont l'absence l'a conditionnée bien malgré elle.
Une maison éclusière au bord de la Garonne, un taudis. Une vieille femme à la limite de la clochardisation et une quarantenaire qui voit en elle tout ce qui ne s'est ni dit ni fait. Qui souffre d'abord de l'absence toujours présente et qui se fait une raison : construisons avec ce que nous avons, même si ce n'est pas grand chose. Construisons sur l'amour que je lui porte, malgré tout.
« Je me suis passée de toi, tu m'y as forcée ; j'ai respiré sans toi, tu m'y as obligée ; du jour au lendemain. J'existais, je n'existe plus ; j'étais la prunelle de tes yeux, tu deviens aveugle ; j'étais ton coeur, il bat ailleurs ; c'est aussi simple que ça ? »
Ce roman de la rentrée littéraire est court, certes, mais juste ce qu'il faut. C'est la bonne longueur pour rappeler l'importance du lien, la force de la filiation, le poids du passé et la nécessité de la réflexion puis, peut-être, du pardon.
Léonor de Recondo écrit avec délicatesse cet amour, cet abandon, cette colère et toutes les émotions qui entourent les parcours de vie de Magda et d'Appolonia. Elle laisse une part de mystère et jette quelques miettes d'Antigone, de-ci de-là, comme autant de petits cailloux de courage et de témérité. De rébellion aussi. Des petits cailloux qui ont permis à Magda de retrouver son chemin, celui de sa maman, celui d'elle-même.
Une très belle rencontre, un roman que je vous recommande chaudement, tandis que je vais de ce pas savourer quelques mots avec celle de qui je viens...
« Sentir sa peau comme la matière première lui permet de se délimiter, de revenir à elle, de se savoir saine et sauve dans son corps, sans égratignures ni entailles, dans son intégrité. »
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