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Norferville

Franck Thilliez

« on a tous, ici, du sang indien. Si ce n’est pas dans les veines, c’est sur les mains. »

Tout commence en 1996, lorsque Léonie et sa meilleure amie Maya, 16 ans, sont violées par trois hommes aux visages masqués. Maya sombrera, Léonie, quant à elle, se nourrira de sa colère et de son besoin de vengeance pour avancer bon-an mal-an. Dans le grand nord canadien, la petite ville de Norferville abrite une grande mine de fer, au détriment du territoire des natifs - dont Maya - qui ont vu leurs terres bouffées par le capitalisme et l’appât du gain. 

C’est ici qu’est retrouvé, en 2016, le corps de Morgane, une jeune française venue dans la petite ville louche mener une enquête sur des jeunes femmes amérindiennes disparues sans laisser de traces. Léonie, devenue flic, est envoyée dans cette bourgade dont elle est issue. Elle y rencontre le père de la victime, Teddy, cinquantenaire brisé, expert en criminologie à Lyon. Ensemble, il  vont mener l’enquête et continuer le travail de Morgane sur les traces d’un terrible prédateur. Chacun confronté à son passé, ses erreurs, ses traumatismes, dans un environnement hostile. Ici, tout leur veut du mal, de la nature aux habitants, en passant par ces étranges chiens qui sont revenus à l’état sauvage par la force des choses. 

Entre deux tempêtes de neiges, ils vont tenter de répondre à leurs nombreuses questions : Sur quoi travaillait Morgane ? En quoi est-ce lié à Léonie ? Et que cache cette scène de crime absolument affreuse ? 


« La vie est tellement étrange (…). Faite d’équilibre et de moments de bascule. On a beau relever la tête, avoir l’impression de marcher droit, on sait qu’on va finir par retomber. »

Un Thilliez pas tout à fait comme les autres. Autre lieu, autre genre, même ambiance. Ça reste du polar bien tourné, qui prend en haleine du début à la fin. On sent que l’auteur a été sur place et qu’il s’est imprégné de l’ambiance, des souffrances, des inégalités et des problèmes liés à la modernisation et l’exploitation des mines d’acier dans cette province du Québec. 

Même si je déplore, depuis quelque temps, des essoufflements - liés sans doute à ce rythme effréné que s’impose l’auteur, je ne peux nier avoir passé un bon moment. On reconnaît des influences, des effets de mode aussi peut-être, dans le choix du lieu de l’action, mais avec un traitement différent et surtout sans les personnages récurrents de Thilliez. Ces nouveaux protagonistes donnent un souffle de nouveauté bienvenu dans l’univers de l’écrivain et on s’attache facilement à cette jeune métisse canadienne et à ce criminologue français. Il y a des choses qui m’ont paru un peu tirées par les cheveux (il est en deuil quand même, ce papa…) mais qui ne donnent pas envie de refermer le livre. 

C’est aussi une mise en lumière de plusieurs aberrations sociétales avec le même souci de maintenir le lecteur dans une tension permanente. Des éléments auxquels on s’attendait mais qui sont suffisamment bien traités pour qu’on adhère et qu’on ait du mal à lâcher le roman. Un Thilliez qui change donc, et qui ouvre le bal des polars de la saison printemps-été 2024 en beauté !


« Le Mal n’avait pas de frontière, pas de hiérarchie, il frappait tout le monde, il habitait tout le monde. »

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