Martin Winckler
« Soigner, c’est autre chose que jouer au docteur ! »
Vingt ans après ma première rencontre littéraire avec Martin Winckler dans « La maladie de Sachs », j’ai été embarquée dans son Chœur des Femmes et ai eu du mal à en sortir.
« Mais nom de dieu, chez un médecin, la gentillesse ça devrait être un équipement de série, pas une option ! »
Jean Atwood a tout pour elle. Belle, talentueuse, ambitieuse, elle termine sa cinquième année d’internat au CHU de Tourmens en espérant se voir confier un service. Spécialisée dans la chirurgie réparatrice gynécologique, elle est passionnée de scalpels et d’intervention. C’est le cœur de son métier, ce qui la pousse toujours plus loin dans la bataille et dans l’apprentissage. Sure d’elle, comme beaucoup de médecins, elle va cependant devoir accepter de se confronter à une autre pratique : pour les 6 mois à venir, elle est envoyée à l’unité 77, chapeautée par Franz Karma, généraliste aux méthodes et aux approches décriées par les autres praticiens.
Jean « Djinn » voit toutes ses représentations exploser au contact de ce médecin hors normes pour qui le patient est le plus important.
Découvrir de nouvelles pratiques en se (re)découvrant soi-même, accepter les autres inconditionnellement en reconnaissant ses propres failles, c’est le chemin que Jean va parcourir auprès de Franz et des autres membres de l’équipe.
« Il est difficile de ne pas porter de jugement. Tu es un être humain. Mais ça ne t'autorise ni à condamner ni à appliquer des peines. »
C’est un roman édifiant que ce chœur des femmes. Le genre de livre qu’on voudrait mettre dans les mains de tous les médecins et professionnels de santé. Les bons et empathiques, en remerciement ; les infâmes et cruels en guise de leçon. Voilà ce que devrait être la relation avec le patient, qui par définition est celui qui souffre.
Martin Winckler connaît ce monde, c’est le sien. Il connaît les travers de la médecine en général et de la chirurgie en particulier. Il est conscient des difficultés des femmes dans un monde qui reste principalement masculin.
L’histoire de Jean et de ses patientes, c’est l’histoire des femmes, des patientes, à qui on impose des choix, à qui on ne fait pas confiance, dont on use et abuse. C’est malheureusement une réalité, même si, de plus en plus, les pratiques changent, et c’est pour le mieux.
Cet auteur et ses romans devraient être au programme de médecine. Pas juste en conférence ponctuelle mais en continu, en soutenu même. Parce que les patients ne sont pas que de la chair, de la matière pour des médecins. Et parce que les docteurs ne sauvent peut-être pas tout le monde, mais ils peuvent réparer, parfois juste en écoutant.
Déclaration d’amour aux praticiens magiciens pour qui soin rime vraiment avec humain.
« … tant qu'on n'est pas mort, on n'est pas vaincu. Tant qu'il y a de la vie, la lutte continue. La seule vraie défaite, c'est la fuite. »
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